9 LECONS STRATEGIQUES A TIRER DUSECTEUR BANCAIRE CONGOLAIS EN 2021
- Alain kouassi
- 9 sept. 2021
- 10 min de lecture
L’ETAT CONGOLAIS MODERNISE SA GESTION FINANCIERE…
La modernisation de la gestion financière de l’Etat congolais a été engagée avec l’adoption par le Parlement, de la loi n°32-2018 du 1 er octobre 2018 portant approbation du plan national de développement 2018- 2022. Dans ce cadre de référence stratégique, l’Etat retient deux (2) principaux axes pour le développement des services financiers. Il s’agit d’une part (i) de la consolidation du système financier dans son ensemble et d’autre part (ii) de la réalisation d’innovations financières de long terme pour accompagner la diversification de l’économie. Le PND 2018-2022 encourageait notamment le développement des activités sur le marché financier régional, avec la possibilité de positionner les OPCVM comme de nouveaux instruments de gestion des liquidités, en l’occurrence par la création de Fonds Communs de Créances (FCC) et de Fonds Communs de Placement (FCP) pour la Diaspora congolaise, les entreprises, etc. Cette orientation trouve d’ailleurs un début de réalisation avec le projet de notation financière en monnaie locale de l’Etat et de dix (10) de ses démembrements engagés par le Ministère des finances et du Budget en septembre 2020. La stratégie nationale a par ailleurs mis un point d’honneur sur les mécanismes de gestion de la trésorerie de l’Etat congolais, avec l’objectif de disposer à terme d’un plan de trésorerie grâce à la maîtrise en temps réel des informations relatives aux recettes détenues par l’administration publique ainsi que la situation des comptes des correspondants du Trésor. Dans le projet de loi finances 2021 présenté au Parlement au mois d’Octobre 2020, certaines dispositions majeures participent à l’implémentation de la stratégie financière de l’Etat. Il s’agit notamment :
▪ du paiement à partir de l’année 2021 par prélèvement et virement bancaire ou télépaiement, de toutes les factures d’eau, d’électricité, de téléphone, d’abonnement et réabonnement aux chaines télévisuelles, d’internet fixe et mobile. Le produit des différents impôts et taxes (le timbre électronique notamment) prélevé automatiquement par les plateformes de télépaiement est reversé directement dans le compte de l’Etat ;
▪ Il est institué un guichet unique de paiement des impôts placé sous la tutelle du ministre en charge des finances et du budget. Le paiement de tous les impôts, redevances, droits, taxes et droits de douanes est effectué auprès dudit guichet, sans tenir compte de la résidence fiscale.
Il convient de souligner par ailleurs que les comptes spéciaux du trésor, ouverts au titre de l’année 2021, sont arrêtés à la somme de cent vingt milliards huit cent quarante-cinq millions (120 845 000 000) de francs CFA répartis en treize (13) fonds sectoriels. 3 :
LES SERVICES « MOBILE MONEY » S’IMPOSENT DE PLUS EN PLUS COMME LE CANAL PAR EXCELLENCE DE LA DIGITALISATION DES SERVICES FINANCIERS ET/OU BANCAIRES AUPRES DES PARTICULIERS.
Bien plus récents que les services bancaires ainsi que ceux des Institutions de Microfinance,
les services mobiles se développent à une allure fulgurante en République du Congo en participant de manière bien plus efficace, à l’inclusion financière. La financiarisation des
particuliers que permettent les services mobiles, constitue un bon tremplin pour donner un coup d’accélération à la faible bancarisation des populations. Une étude conduite par le
Conseil National du Crédit (CNC) de la République du Congo en 2019, présente les indicateurs suivants de mobile money sur la période 2016-2019 :

A l’instar des tendances lourdes mondiales, les objets-nomades comme le téléphone mobile cristallisent de plus en plus le type de « concurrence asymétrique » qui caractérise la stratégie des acteurs du secteur bancaire et de ceux de la téléphonie mobile. Les services « Mobile money » gagnent énormément du terrain au point d’incarner surtout en Afrique, le meilleur canal des services à distance. Progressivement, ils réduisent, du moins pour ce qui concerne les personnes physiques, les raisons pour lesquelles la fréquentation d’une agence bancaire s’avérait absolument indispensable il y a une décennie ! La croissance de l’internet mobile ainsi que le taux d’équipement en smartphone, tablettes ou autres objets connectés participent à l’accélération de cette trajectoire de digitalisation des services financiers et/ou bancaires. 4 Le CNC a établi une comparaison de la couverture des services « Mobile Money » dans les pays de l’Afrique de l’Est (Communauté de l’Afrique de l’Est) avec le Congo. Les résultats se présentent ainsi qu’il suit :

Comme le souligne le tableau 2 et le graphique ci-après, la gamme des services couverts par le mobile money au Congo est encore faible et peu diversifiée et les marges de progression restent considérables.

De nombreuses Banques du secteur disposent de solutions susceptibles de favoriser une meilleure interopérabilité entre les comptes bancaires et les comptes mobiles. En 2020, les seules banques établies au Congo à disposer de solutions réellement interopérables entre les comptes bancaires et les comptes mobiles de leurs clients, sont présentées dans le tableau ci-dessous :

L’enquête réalisée par BRAIN PERFORMANCE, souligne encore la forte propension pour les particuliers à utiliser les espèces pour régler leurs achats. On note cependant une généralisation de l’utilisation du Mobile Money pour les transferts d’argent domestiques. A l’international, le service de guichet « Western Union » reste le plus utilisé devant les autres solutions Moneygram, Rapid Transfert, Africash, etc. !

Les services « Mobile Money » se sont enrichis en 2020 au Congo, avec notamment le lancement des activités de l’entreprise « DIGIPAY » qui met à la disposition de sa clientèle, sa solution « Digitransfer » permettant de réaliser des transferts d’argent à l’international en destination d’un compte mobile bénéficiaire (opération « cash to account »). Par ailleurs, la plateforme « GUEN’S Money » (www.guensmoney.com) qui a lancé ses activités en décembre 2020, offre elle aussi la possibilité de réaliser des transactions à distance (recharge et envoi d’argent, retrait d’argent, paiement marchand, etc.) à partir d’un compte digital ouvert sans tracas (en 4 minutes selon l’argument de prospection avancé). Les opérateurs mobiles congolais MTN et AIRTEL disposent de services de transfert d’argent à l’international. MTN Congo a ainsi lancé en Août 2020, son service WorldRemit Transfert d’argent (Rémittence International IN) qui permet aux abonnés MTN Mobile Money de recevoir de l’argent en provenance de 52 pays (Europe, Afrique, Asie). Plus généralement, les opérateurs mobiles sont très actifs et gardent pour l’instant la main sur le « juteux » segment de la financiarisation des particuliers à partir de leurs comptes mobiles, et enregistrait déjà en 2018 plus 155 Milliards de recharges de comptes mobiles contre 912 Milliards de dépôts à vue bancaires sur la même année

L’entreprise CONGO TELECOM dont l’activité dans le secteur de la téléphonie mobile en général et en particulier, au niveau des Services Mobiles Money reste jusque-là quasi-inexistante, est une société à participation publique majoritaire. Elle est constituée sous forme de société anonyme avec Conseil d’Administration et a saisi l’année 2020 pour faire « peau neuve », aussi bien au niveau de sa gouvernance qu’au niveau de ses services commerciaux. Le potentiel de croissance encore largement inexploité de cette entreprise, représente un « vivier stratégique » qui mérite une attention particulière durant les prochaines années. :
UN SECTEUR BANCAIRE CONGOLAIS ORGANISÉ EN GROUPES STRATEGIQUES…La présence de l’Etat congolais directement ou indirectement dans la structure de l’actionnariat de la majorité des établissements de crédit du secteur bancaire congolais, permet de retenir la participation de l’Etat au capital des Banques, comme un des critères majeurs de constitution des groupes stratégiques. Le second critère retenu pour croiser le premier en vue de la classification de la stratégie des Banques, est l’appartenance ou non à un réseau bancaire international ou non. On peut donc distinguer dans le secteur bancaire congolais, trois (3) grands groupes stratégiques (avec le classement des différentes banques en 2020 selon le niveau des créances sur l’économie) comme le montre la figure 1 ci-dessous :

Les Banques du « Groupe Stratégique 1 » obéissent à des manœuvres stratégiques avant tout, propres aux orientations définies par leur « Groupe Bancaire » respectif. Elles peuvent ainsi compter sur l’expérience des autres Banques de leur réseau d’appartenance et bénéficier de synergies internes à leur groupe (progiciel Core-banking, Transferts d’argent intragroupe, etc.), en vue d’optimiser leurs interventions dans le secteur bancaire congolais. Ces Banques sont plus dynamiques dans les opérations internationales (virements,
rapatriements ou transferts de fonds, crédits import/export, cartes bancaires internationales, placements de trésorerie, etc.) et semblent en faire leur principal argument commercial pour capter les opérations importantes de la clientèle « Entreprise », des expatriés, des représentations étrangères, de l’Etat congolais, etc. Ces Banques possèdent une meilleure santé financière, en raison des normes spécifiques à chaque groupe bancaire et occupent à raison les toutes premières places du classement des banques les plus actives en 2020 sur le segment des créances sur l’économie.
A l’opposé, les Banques du « Groupe Stratégique 2 » arrivent toutes en « queue » de classement pour cette année 2020. Privées de l’atout majeur et de l’effet structurant d’un réseau bancaire international, elles se focalisent sur une clientèle locale des « Particuliers », volumineuse, coûteuse en frais de gestion de réseau d’agences et peu rémunératrice en raison de la faiblesse de l’encours des opérations sur ce segment. La BPC qui se positionne au 9 ème rang dans le secteur bancaire sur le segment des créances sur l’économie en 2020, est le seul établissement de crédit encore « viable » dans ce groupe stratégique, puisque la BCH et la BESCO sont en situation de redressement depuis au moins deux années. La BSCA est la seule Banque dans le « Groupe Stratégique 3 ».
Elle occupe une position charnière entre les deux groupes stratégiques précédents et représente avec plus 53 Milliards de capital social, l’établissement de crédit le mieux capitalisé du secteur bancaire congolais en 2020. Sa stratégie semble s’inspirer à la fois des atouts des réseaux bancaires internationaux et de l’impératif des Banques à ancrage locale, de rapprocher les services bancaires des populations. Sur ce dernier volet, contrairement à la BPC dont la stratégie repose jusque-là sur le maillage du territoire en agences bancaires, la BSCA a affiché plutôt l’ambition de rapprocher les services bancaires des usagers via un important réseau de guichets automatiques de banque dans les principales villes de Brazzaville et de Pointe-Noire.
LE PROFIL DE LA CLIENTELE BANCAIRE DES PARTICULIERS
Dans l’enquête réalisée auprès de 800 particuliers à Brazzaville et Pointe-Noire, de grandes tendances sont à souligner :
▪ le plus grand nombre des personnes interrogées se retrouvent dans la tranche d’âge de 26 et 45 ans (environ 68%) ;
▪ les clients bancarisés sont principalement des cadres, des employés (qualifiés ou non) et des travailleurs pour compte propre ;
▪ les clients bancarisés travaillent essentiellement dans l’administration et dans le commerce ou la vente ;
▪ les clients bancarisés se retrouvent majoritairement (plus de 50%) dans la tranche de revenu mensuel entre 100.000 et 499.000 FCFA.


Quatre établissements du crédit (Crédit du Congo, Ecobank, LCB et UBA) s’arrachent la majorité des clients « Particulier » interrogés au cours de l’enquête comme le montre le graphique 10. Ces Banques il faut le souligner, appartiennent au « Groupe Stratégique 1 ». En particulier, UBA Congo arrive en tête des banques où les personnes interrogées détiennent leur compte principal. Environ 6% des particuliers interrogés dans le cadre de cette enquête, affirment détenir leur compte principal à la BPC, à la BESCO et à la BSCA. Il convient aussi de rappeler que ces Banques appartiennent respectivement au « Groupe Stratégique 2 » et au « Groupe Stratégique 3 »
76,42% des personnes interrogées soulignent qu’elles ne possèdent pas de comptes bancaires dans d’autres établissements de crédit autre que ceux dans lesquels elles possèdent leur compte principal. Ceci souligne une forme de « fidélité » que les particuliers développent vis-à-vis de la Banque

où ils détiennent leur compte principal. La stratégie de multibancarisation des particuliers semble s’organiser autour de « Groupes Stratégiques » différents, dans la mesure où les services bancaires sont généralement identiques et homogènes à l’intérieur d’un même « Groupe stratégique ». Les résultats de l’enquête révèlent ainsi qu’environ 30% des particuliers disant détenir leur compte principal à la BPC, possède des comptes secondaires à la BSCA (8,54%), à la BCI (8,31%), UBA (7,42%) et BGFI (6,74%)
MTN est l’opérateur mobile qui accompagne l’activité digitale de la majorité des clients particuliers interrogés. On peut d’ailleurs noter une tendance certes insignifiante de certains enquêtés (environ 13%) qui préfèrent avoir l’opportunité de réaliser certaines de leurs opérations bancaires à partir des kiosques des opérateurs mobiles en général et des kiosques de l’opérateur MTN en particulier (9,17% des personnes interrogées). Les clients particuliers possèdent par ailleurs, une activité digitale très significative essentiellement à partir de leurs téléphones mobiles et disposent aussi de comptes virtuels principalement sur Facebook et WhatApps de manière simultanée.

L’IMAGE QUE LES PARTICULIERS ONT DES BANQUES CONGOLAISES RESTENT MITIGÉE…
Les particuliers interrogés soulignent que les Banques sont très professionnelles (18,34%) et que certaines d’entre elles sont très sérieuses alors que d’autres établissements de crédit le sont moins (34,93% des opinions exprimés). Les Banques perçues

comme étant les moins sérieuses du secteur sont la BCH (21,23%) et la BESCO (17,32%). Il s’agit bien là essentiellement de Banques appartenant au « Groupe Stratégique 1 » ! La Banque perçue comme étant la plus sérieuse est la BGFI (52,17%). Enfin, 23,58% des enquêtés estiment que les « toutes les Banques profitent de leurs clients pour s’enrichir ».
LA MEILLEURE BANQUE SELON LES PARTICULIERS…
Qu’il s’agisse des clients bancarisés ou de ceux non bancarisés, la Banque UBA Congo est perçue comme étant le meilleur établissement de crédit du secteur bancaire congolais. Cependant, il y a une proportion importante de personnes interrogées auprès des deux (2) strates qui estiment qu’aucune des banques du secteur ne se démarque réellement.

IL SUBSISTE ENCORE D’IMPORTANTS FREINS A LA BANCARISATION…
L’enquête conduite auprès des particuliers non bancarisés permet de confirmer que le profil économique influence le choix d’ouverture ou non d’un compte bancaire. Ainsi, une proportion importante de particuliers non bancarisés se tient-elle encore à bonne distance des banques parce qu’elle estime qu’elle n’a pas assez d’argent pour ouvrir un compte en Banque (27,60%) ou par manque d’informations sur les conditions d’ouverture de comptes (21,72%) ou pour éviter les complications et tracasseries administratives liées à l’ouverture d’un compte bancaire (28,96%). A ce sujet, les enquêtés soulignent en effet ne pas détenir de pièces d’identité valides ou de tous documents administratifs généralement requis pour l’ouverture d’un compte bancaire. Ils préfèrent disposer de comptes alternatifs (Microfinance, mobile money, etc.) à des conditions administratives et financières bien plus souples

Contrairement aux particuliers bancarisés, les particuliers non bancarisés se retrouvent majoritairement dans la tranche de revenus mensuels en dessous de 199.000 FCFA (environ 80% des enquêtés de cette strate). On peut comprendre l’attrait des particuliers non bancarisés, pour les comptes Mobiles Money et pour les établissements de Microfinance à l’instar notamment de la MUCODEC
CE QUE LES PARTICULIERS N’APPRECIENT PAS CHEZ LES BANQUES
Les particuliers interrogés au cours de l’enquête n’apprécient pas dans leur grande majorité ; le mauvais accueil en agence (57,21%), le manque d’informations et de prise en charge de la clientèle au sein des agences de banque (54,59%), la mauvaise gestion des files d’attentes (54,59%) et la lenteur des services aux guichets (51,53%). Il s’agit pour l’ess

entiel de maux qui sont liés à la dimension Humaine du travail dans les Banques congolaises et au professionnalisme des agents de banque assurant l’interface-client avec les usagers aux agences.
CE QUE LES PARTICULIERS APPRECIENT LE PLUS CHEZ LES BANQUES…
Les particuliers interrogés au cours de l’enquête apprécieraient dans leur grande majorité que des améliorations s’opèrent au niveau des Banques congolaises, principalement au niveau du confort des agences (64,19%), de la qualité de l’accueil en agence (58,08%) et la rapidité des services aux guichets de banque (51,53%). Il se dégage p

ar ailleurs, une réelle attente pour la disponibilité de l’information (40,17%), via notamment de nombreuses applications qui fonctionnent et permettent de réaliser des opérations sans être obligé de se rendre dans une agence de banque (37,55%).
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